
Portrait d’une ville moyenne, richement dotée d’un environnement agricole et touristique de très grande qualité, ayant su orienter son potentiel industriel ancien (le papier notamment) vers une filière d’avenir (l’image, le cinéma, la bande dessinée, la création). Présentation de ses efforts pour développer ses riches atouts, son potentiel culturel, économique et écologique.
Pouvez-vous nous présenter l’identité du territoire du Grand Angoulême, ce qui en fait sa caractéristique ?…
Notre territoire allie à la fois l’urbain et le rural, comme tous ces territoires tirés par une ville moyenne ayant qualité de préfecture. Il est facile à vivre, car à taille humaine, présentant beaucoup d’atouts, notamment en termes d’ensoleillement, de proximité avec la côte Atlantique. Notre ville et son bassin de vie permettent à chacun d’équilibrer vie professionnelle et personnelle, de s’épanouir. Certains diraient qu’il existe à Angoulême et sur le Grand Angoulême une sorte de dolce vita angoumoisine.
Mais c’est aussi un territoire connecté, proche de Paris et de Bordeaux grâce à la LGV (les TGV les plus rapides sont à 1h45 de Paris et à 35 minutes de Bordeaux). Connecté au très haut débit, il poursuit son aménagement avec un programme ambitieux d’installation de la fibre, sous l’impulsion du département et l’accompagnement de la région.
Évidemment, quand on parle de fibre on parle aussi de développement économique, d’installation d’entreprises, que stimule la ville, grâce à un foncier disponible, attractif, de qualité, à fort caractère patrimonial. Les tarifs immobiliers n’excèdent pas 2 200 euros du mètre carré. Les conditions sont réunies pour accueillir des familles, même de niveau modeste, qui souhaiteraient quitter la Capitale.
Nous voulons créer un écosystème favorable aux entrepreneurs en leur offrant une véritable boite à outils, et un accompagnement sur mesure, de la phase d’incubation à la phase d’innovation.
Nous prêtons attention à tout ce qui touche à l’environnement, par exemple avec notre projet de territoire à énergie positive (TEPOS). Nous voulons créer un écosystème favorable aux entrepreneurs en leur offrant une véritable boite à outils, et un accompagnement sur mesure, de la phase d’incubation à la phase d’innovation.
Donc pour résumer mon propos : nous sommes un territoire d’excellence, où le tissu d’entreprises associe des savoirs-faire anciens et modernes.
Le papier, c’est l’ancien, le moderne c’est évidemment l’image ?…
Oui, et les industries culturelles et créatives rayonnent à l’international, comme la filière BD/Image. Mais Angoulême possède aussi une industrie forte (nous sommes le deuxième bassin de vie le plus industriel en termes d’emploi, après évidemment la métropole bordelaise), une belle histoire industrielle aujourd’hui tournée beaucoup vers l’industrie mécanique, le packaging, la filière des spiritueux.
Quelles sont les structures d’accompagnement à l’innovation, d’incubation ?
Nous avons ouvert il y a quelques mois la technopole Eurekatech, avec le concours financier du conseil régional. Elle offre un véritable service d’accompagnement à l’innovation, d’appui aux créateurs et au développement d’entreprises, un certain nombre de services, l’accès à des Fab Labs.
Le territoire s’inscrit dans une volonté d’excellence.
Sur ce parc Krysalide, les créateurs peuvent renforcer leurs liens avec les grandes entreprises déjà présentes sur le territoire voulant investir davantage dans la recherche et le développement. Ils peuvent se consacrer dans d’excellentes conditions à leur projet de développement, d’innovation et de R&D, dans des espaces mis à leur disposition par le Grand Angoulême.
Quelle est la philosophie générale de votre action ?
Et bien d’abord, le territoire s’inscrit dans une volonté d’excellence. La filière créative et culturelle que nous mettons souvent en avant, la filière image, s’est construite peu à peu, depuis une bonne vingtaine d’années. L’ADN du territoire est évidemment culturel, mais nous avons aussi conçu ce secteur culturel avec une volonté de développement économique et de l’emploi.
Nous avons accueilli de fabuleuses expositions, notamment à l’occasion du centenaire de Gaumont, développé le festival de la bd, le pôle image Magelis, le festival du film francophone, qui en une dizaine d’années a pris une importance considérable. Avec les tournages de cinéma, la main d’œuvre qualifiée qui vit à Angoulême et en Charente, nous avons noué des relations à long terme et structurantes avec un certain nombre de grands producteurs et de grandes maisons du cinéma, comme la Gaumont.
Au-delà des filières industrielles, des industries culturelles et créatives qui sont des points forts de notre territoire, nous renforçons aussi notre action sur les questions d’agriculture locale, le consommer local et la préservation des ressources du territoire.
Nous inscrivons clairement et durablement notre territoire dans une stratégie de prise en compte du changement climatique et de la transition écologique.
Nous inscrivons clairement et durablement notre territoire dans une stratégie de prise en compte du changement climatique et de la transition écologique, à travers l’agriculture, le consommer local, la structuration d’une filière de production agricole locale. Nous souhaitons aller davantage sur les questions de transition énergétique (territoire à énergie positive, filière hydrogène développée sur le parc Krysalide, avec des entreprises reconnues comme Nexeya), d’économie circulaire, d’économie sociale et solidaire, et de résilience alimentaire.
Nous avons notamment engagé un partenariat de recherche avec notamment les Greniers d’Abondance pour faire de notre territoire un territoire pilote, plus résilient, plus autonome en matière alimentaire. Il faut plus impliquer les citoyens et les élus sur ces questions essentielles, mieux éduquer les plus jeunes, à l’école, sur les sujets d’alimentation locale et de qualité.
Il faut donc soutenir notre agriculture, mieux accompagner la population agricole encore présente sur notre territoire, faire évoluer les pratiques vers l’agroécologie, faciliter les transmissions de propriétés et de fermes agricoles. Préserver nos terres maraichères, nos terres agricoles. Réfléchir à la sobriété foncière, et mettre fin à l’étalement urbain, requalifier les friches urbaines existantes, développer différentes cultures, différents modes agricoles, avec les acteurs de l’agriculture et notamment la chambre d’agriculture de Charente.
Et en matière viticole ?
Les maisons familiales de taille modeste et les grandes maisons de négoce comme Hennessy, Martell, Rémy Martin, se préoccupent du changement climatique qui augmente le degré d’alcool. Le vignoble d’appellation Cognac fait partie de ces filières et ces secteurs qui sont le plus en pointe dans la recherche à ce sujet et qui y consacrent le plus de moyens depuis plusieurs années.
Les problèmes de l’eau sont-ils importants dans la région (sécheresse, inondation…) ?
On peut en effet souffrir de la sécheresse comme bon nombre de territoires, pour autant on a la chance d’être sur un territoire ici où l’essentiel de notre consommation d’eau provient en effet des sources de la Touvre, qui est une source à la fois vraiment exemplaire, et pour beaucoup, quasiment inépuisable.
La question de l’eau, à usage domestique, est assurée par l’agglomération par l’usine d’eau de la Touvre. C’est notre plus gros chantier, 25 millions d’euros, en cours de réalisation, qui sera livré pour 2024 et qui nous permet de sécuriser notre distribution, à la fois en volume, sur le plan hygiène et développement durable (préservation de l’eau, prise en compte du changement climatique et de l’environnement).
Vous évoquiez l’énergie, l’hydrogène.
C’est une énergie qui a la particularité de pouvoir être produite par tous et partout, et nous avons la chance d’avoir des entreprises en pointe sur la question de l’hydrogène sur notre territoire. La technopole Krysalide a investi la question de l’hydrogène à travers une pile hydrogène. La source primaire, c’est le solaire qui permet d’extraire l’hydrogène de l’eau par électrolyse. Nous avons une capacité de produire de l’énergie, la stocker et la redistribuer dans le bâtiment au fil des besoins et tout au long de l’année. La région Nouvelle Aquitaine suit particulièrement ces travaux et nous accompagne sur la volonté de nous projeter sur cette filière Hydrogène.
Le bâtiment du Technopole est totalement autonome en terme énergétique, et nous imaginons une station de recharge de vélo à hydrogène sur site. Nous lançons une étude pour aller plus loin grâce à la présence d’entreprises comme Nexeya, réalisatrice de la pile hydrogène et d’autres acteurs locaux.
La relance passera par les collectivités locales, par le bloc communal, à l’écoute des territoires, sur la base de projets mûrs pour pouvoir être lancés, et non pas par des énièmes appels à projets.
Un petit mot sur l’économie sociale et solidaire…
Le territoire brille aussi par la présence de nombreux acteurs associatifs, voire de sociétés coopératives qui investissent le champ de l’économie sociale et solidaire. Ils peuvent être un véritable levier de développement demain. Ils présentent aussi l’avantage de participer à la réinsertion de bon nombre d’habitants en recherche d’emploi, souvent assez peu diplômés, et qu’il faut réinscrire dans un chemin de formation, de resocialisation par l’emploi.
Ces acteurs sérieux, reconnus, et qui parfois pour certains d’entre eux ont une résonnance même régionale, (je pense à la société coopérative ENVIE) sont un atout pour le territoire. Nous soutenons et nous accompagnons ces modèles. Il faut se préparer au choc qui s’annonce, faire du développement économique et de l’emploi une priorité forte pour les années à venir : nous formulons aussi le souhait de porter sur les fond baptismaux une vraie politique de solidarité à travers un certain nombre d’outils, et l’économie sociale et solidaire en fait partie.
Quels sont vos projets d’aménagement autour de la gare et de la LGV ?
Le quartier gare conclut un aménagement impulsé au début des années 2010. Il sera totalement rénové, renouvelé, pour accueillir des logements, une résidence pour les personnes âgées, de nouveaux commerces de proximité, des bureaux d’accueil d’entreprises, un hôtel avec un restaurant. De nouveaux centres d’activités sortent de terre avec l’installation de la médiathèque d’agglomération. Une gare qui s’inscrit définitivement dans le XXIe siècle, connecté au pôle d’échange multimodal qui permet à chacun de pouvoir disposer de l’entièreté de l’offre de mobilité urbaine sur un seul et même site. Bref, c’est un centre d’agglomération, autour de la gare, au pied du plateau et du quartier historique de la vieille ville d’Angoulême.
Qu’attendez exactement de la relance ? est ce qu’elle est pour vous importante, nécessaire ?
Pour moi, la relance passera par les collectivités locales, par le bloc communal, à l’écoute des territoires, sur la base de projets mûrs pour pouvoir être lancés, et non pas par des énièmes appels à projets, appels à manifestations d’intérêt que l’État a le talent de lancer chaque fois que la politique gouvernementale prend un nouveau virage.
C’est les communes et c’est les intercommunalités qui sont à même de les identifier. Je crois que chaque élu sait se montrer responsable sur l’usage des finances publiques, notamment après toutes ces années où on a diminué les dotations globales de fonctionnement pour participer au redressement des finances publiques de la France. Les collectivités ont fait des efforts, elles ont su préserver leur capacité d’investissement et leur capacité à faire.
On voit clairement le développement d’un mouvement des territoires d’industries. Est ce qu’il y a un tel projet sur Angoulême ?
Oui, nous sommes bien labellisés territoire d’industries sur notre territoire, depuis les premières annonces, notamment avec l’intercommunalité voisine, la communauté de communes La Rochefoucauld-Porte de Périgord.
Propos recueillis par Didier Raciné
Rédacteur en chef d’Alters Média