Vers une stratégie industrielle des territoires
Entretien avec Guillaume Basset, Directeur du programme « Territoires d’industrie »

 

Le Programme Territoire d’Industrie n’a sans doute pas montré tout son potentiel de redéploiement d’une politique industrielle territorialisée en France et de déploiement d’une politique territoriale de renforcement des territoires. Car cette politique industrielle territorialisée a besoin de nombreux autres aspects pour réussir : le lien avec une politique de formation, de recrutement et d’insertion ; le lien avec des capacités stratégiques des territoires… Présentation par le responsable du Programme sous forme de deux articles.

 

Territorialisation de la politique industrielle

La force du couple Industrie-Territoire

 

Le Programme « Territoire d’Industrie » est la pièce maîtresse de l’action de renforcement de l’industrie dans le pays. Il tient sa vigueur d’être parti des territoires eux-mêmes, et d’avoir pensé l’expression de ces besoins locaux par le binôme Industriels/ collectivités territoriales. Les orientations des projets, sur les orientations stratégiques de notre époque, laissent espérer une relance collective, elle aussi stratégique.

Pouvez-vous nous préciser le rôle du programme Territoires d’industrie, au travers de ses quatre axes : recruter, attirer, innover et simplifier ? Que représentent ces différents axes, concrètement et spécifiquement ?
Ce programme répond à plusieurs objectifs.

Le premier, c’est de davantage structurer les écosystèmes industriels locaux. Nous nous sommes rendus compte, pendant la précédente crise, que les territoires industriels qui avaient le mieux résisté étaient ceux où s’opérait une coopération forte entre les différents acteurs (industriels, publics…) : là où il y avait, finalement, un capital social.

Le deuxième objectif partait d’une volonté de donner carte blanche à ces territoires industriels pour faire émerger des projets autour de l’industrie en faisant – et c’est là le troisième objectif – évoluer les modalités d’intervention des politiques publiques : ne pas être dans des logiques d’appel à projet, où on cherche à dupliquer ou à généraliser telle ou telle solution, mais plutôt de partir du terrain et de la dynamique locale qui génère des projets que l’on va essayer d’accompagner au mieux.

Le programme est donc structuré autour des quatre axes que vous avez cité, et qui avaient à l’origine pour but d’orienter les plans d’action des territoires d’industrie. Certains de ces derniers ont complété ces axes là et ils ont eu raison de le faire !

Les axes recruter et attirer sont essentiels dans ce projet : comment je peux attirer des investisseurs au sein de mon territoire, comment je recrute et je forme la main d’œuvre localement. Ces deux axes centraux sont intimement liés.

Dans la problématique de l’attraction, il y a également la question du foncier, qu’on évoque souvent moins que celle des compétences mais qui est majeure dans le domaine de l’industrie, notamment dans un contexte de « zéro artificialisation ». Les ressources foncières sont moins illimitées qu’avant, l’objectif étant de préserver les terres agricoles et de reconquérir les friches pour reconstruire l’industrie.

 


Le Programme Territoires d’industrie

« Territoires d’industrie » est un programme de reconquête industrielle, lancé en 2018. Il vise à déployer dans chacun des 146 Territoires d’industrie des plans d’actions sur 4 axes (recruter, attirer, innover, simplifier), favorisant le développement de l’industrie dans ces territoires. Ce programme est piloté par les Régions et animé par des binômes élu/industriel dans chaque territoire d’industrie.

253 projets validés 1,4 milliards d’euros d’investissements industriels, 142,7 millions d’euros d’aides publiques, 5 075 emplois à créer, 69 % des projets sont situés en territoires fragiles.


 

Est-ce que ce mouvement, porté par Territoires d’industrie, cherche à développer des « clusters », des grappes d’entreprises regroupées, ou plutôt soutenir principalement un ou deux industriels sur un territoire ?
Nous cherchons à développer ces deux aspects. Nous accompagnons bien entendu des projets individuels d’entreprise. Néanmoins, notre logique est aussi de faire émerger des projets collectifs, qui sont pour nous créateurs de valeur. Pour moi, cela ne s’oppose pas, et cela peut même être complémentaire.

Les territoires industriels qui avaient le mieux résisté étaient ceux où s’opérait une coopération forte entre les différents acteurs (industriels, publics…) : là où il y avait, finalement, un capital social.

En outre, nous nous inscrivons dans une logique de passerelle entre des filières : que l’agroalimentaire dialogue avec la métallurgie, par exemple, car il y existe un certain nombre de compétences transverses, d’enjeux communs, notamment en matière de décarbonation. Nous ne sommes donc pas dans une logique sectorielle, et d’ailleurs la plupart des territoires d’industrie, à part quelques contre-exemples comme la vallée de l’Arve ou certains territoires de l’ouest, sont plutôt multi-filières. Pour faire levier, porter un certain nombre de projets, et atteindre la dimension critique, il est nécessaire de faire travailler ensemble des industriels issus de filières différentes, qui souvent ne se connaissent pas.

 

Quelles sont les grandes tendances des orientations industrielles de ces nombreux territoires d’industrie ?
Comme je vous le disais, l’industrie de ces territoires est souvent multi-sectorielle.

Les secteurs qui aujourd’hui sont les plus accompagnés par notre structure sont ceux qui ne font pas l’objet d’outils spécifiques, comme le plan automobile ou le plan aéronautique. Nous nous situons donc plutôt sur des filières comme la mode et le luxe, la chimie, la santé, l’agroalimentaire, et, évidemment, la métallurgie. Ce sont les filières les plus génératrices de projets, et elles sont fortement ancrées dans les territoires. On voit également ces derniers temps un certain nombre de projets émerger des industries du bois.

 

Peut-on préciser le rôle des collectivités territoriales ?
Le rôle des intercommunalités est absolument clef, car c’est l’échelle d’émergence, de montage et de mise en œuvre des projets. Il va de la détection d’idées dans les territoires à l’accompagnement.

Aujourd’hui, la prise en main de la compétence économique est variable d’une intercommunalité à une autre, parce qu’il s’agit d’un échelon relativement récent, qui a un peu plus de vingt ans d’existence. Mais il est primordial de faire « monter en gamme » cette compétence économique, vis-à-vis de certaines problématiques. On peut évoquer le sujet de la formation compétence, qui est extrêmement technique et qui englobe une pluralité d’acteurs avec un coût d’entrée très important.

Ces collectivités ont également une compétence très importante par exemple par rapport aux questions de foncier ou d’immobilier industriel.

Le rôle des intercommunalités est absolument clef, car c’est l’échelle d’émergence, de montage et de mise en œuvre des projets. Il va de la détection d’idées dans les territoires à l’accompagnement.

En parallèle, il y a également le rôle des régions, qui se situe plutôt sur le financement de projet, et ce à un niveau régional mais également européen, car elles sont depuis 2014 autorité de gestion quant aux fonds européens, notamment ceux du FEDER et du FSE, et demain celui du FTJ, le Fonds pour une Transition Juste, qui évoque la question de la décarbonation de l’industrie.

Les régions jouent également un rôle sur la chaîne orientation, éducation, formation et emploi.

Tout cela a été bousculé par la fusion des régions, par rapport à leur capacité à bien connaître leur écosystème et leurs acteurs industriels. Cela va être pour elles un enjeu de se restructurer sur des périmètres beaucoup plus larges, avec par ailleurs des compétences qui ont été renforcées, pour leur permettre de conserver la proximité avec leur tissu industriel. Cela est bien sûr variable d’une région à une autre.

 

Vous avez présenté, en mai 2020, les leçons que vous avez tirées de l’expérience en cours. Vous évoquiez l’idée qu’une politique de relocalisation passe avant tout par une politique d’achat des entreprises françaises pour sécuriser leur approvisionnement et recréer des filières locales. Voyez-vous une évolution dans ce domaine ?
Il y a eu un véritable effort de fait en termes de politique de l’offre, à travers le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, à travers la diminution des impôts de production… Cette politique a porté ses fruits, notamment parce que l’on s’est remis à produire de l’emploi industriel de 2016 à 2019.

Cela étant, elle doit également s’associer à une politique de la demande. Pour citer un exemple, nous encourageons, à travers le guichet des industries du futur, les entreprises à acquérir des solutions relatives à ces industries : cela peut passer par l’internet des objets, l’intelligence artificielle, la maintenance prédictive, les jumeaux numériques, etc. Il y a un enjeu à ce que ces solutions bénéficient aux industriels français. Nous avons par exemple encouragé l’émergence de Boost French Fab, qui est la réunion d’industriels français, qui sont offreurs de solutions dans ce domaine des industries du futur, et d’autres qui souhaitent passer ce virage du numérique.

Il faut également parler de l’achat local, et de l’économie circulaire. Prenons l’exemple d’un projet, dans les Vosges, de transition de la filière vers les fibres biosourcées, comme le lin ou le chanvre, les orties, donc des productions plutôt locales. Ces démarches sont très importantes pour à la fois pour retrouver de la valeur dans les territoires et pour atteindre nos objectifs climatiques.

 

Quid du potentiel d’attractivité de l’écologie ?
Les projets qui ont une orientation vers la transition écologique représentent quarante-trois pour cent du volet France Relance de Territoires d’industries. On peut lister sept grands enjeux autour desquels on ressent vraiment cette dynamique : ceux liés l’hydrogène, avec dix-neuf projets concrets, à la décarbonation, à l’optimisation de la consommation en eau, à la production biosourcée, par exemple dans les domaines du textile ou du bâtiment, à la production d’énergie verte, avec la géothermie, à l’optimisation de la consommation énergétique, et enfin, au recyclage et à l’économie circulaire.

Nous avons aujourd’hui deux cent soixante-quatorze projets qui sont remontés dans le cadre du fonds d’accélération des investissements industriels dans les territoires, et qui sont axés quasiment à cent pour cent sur la transition écologique.

Encouragé l’émergence de Boost French Fab, qui est la réunion d’industriels français, qui sont offreurs de solutions dans ce domaine des industries du futur.

On dit souvent que l’industrie représente dix-huit pour cent des émissions de gaz à effet de serre, mais c’est aussi cent pour cent de la solution. On est face à des industriels qui ont pris conscience des enjeux et de leur urgence, de la nécessité d’aller beaucoup plus vite. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas, encore, un travail de conviction à faire : il est nécessaire, mais c’est vu par la plupart comme une obligation de survie.

Nous sommes également sur des problématiques de modèle économique pour certaines innovations, et il y a bien sûr cet enjeu-là, notamment sur la question des taux de retour sur investissement.

 

Vous évoquez un projet de site industriel clé en main. Est-ce que ce programme relève de l’idée de limiter la consommation de foncier en développant, finalement, de l’industriel sur de l’industriel pour ne pas manger sur de nouvelles terres ?
Ces projets renvoient plutôt à une logique d’anticipation : anticiper les procédures pour anticiper les autorisations. Pour cela, il faut donner aux investisseurs la visibilité sur les terrains, pouvoir leur montrer que les études préventives, écologiques et archéologiques, ont été menées, que la problématique de l’urbanisme a été prise en compte et avoir la liberté de leur délivrer les permis en moins de dix mois.

L’industrie représente dix-huit pour cent des émissions de gaz à effet de serre, mais c’est aussi cent pour cent de la solution.

Par ailleurs, le deuxième objectif de ce projet est effectivement de donner la priorité aux friches industrielles, pour affirmer cette volonté de s’inscrire dans une démarche de zéro artificialisation. C’est pour cela que l’on a pris en compte dans les candidatures des territoires le sujet de la sobriété foncière.

Notre troisième objectif a été de réfléchir concrètement à ce que pouvait être le site industriel de demain : un site qui ne soit pas simplement purgé des autorisations réglementaires mais aussi qui traite des problématiques écologiques de gestion des déchets, de maîtrise et de bonne gestion des ressources en eau, de production des énergies renouvelables, du stockage des données, du compactage de l’industrie, de la mutabilité du foncier. Nous avons donc lancé une expérimentation qui nous permet, à travers ce que l’on appelle des fabriques prospectives, d’accompagner huit sites clé en main (comme ceux de Lannion, de Niort ou de Melun Val-de-Seine) autour de ces enjeux-là.

 

Le capital social des territoires et l’Industrie

 

La force du Programme Territoire d’Industrie vient aussi de ce qu’il pousse les territoires à renforcer leur capital social, au service de leur industrie : la question des formations, des recrutements, de l’insertion d’une part ; mais aussi les capacités technologiques, des questions de mobilité… Ce sont ces points que développe ici le responsable du Programme.

 

Vous avez présenté, en mai 2020, les leçons que vous avez tirées de l’expérience en cours. Vous évoquez notamment le fait que les territoires les plus résilients étaient ceux qui disposaient d’un « capital social fort » : pouvez-vous développer ce thème ?
Par capital social, on entend la confiance entre les acteurs et leur capacité à travailler ensemble. C’est un déterminant très important dans la trajectoire économique des territoires.

Certains sont dans une dynamique très positive de volonté de coopération. Je pense par exemple à Lacq-Pau-Tarbes, qui souffrait historiquement de la concurrence très forte entre Pau et Tarbes et dont les élus ont récemment pris conscience de ce jeu perdant. Ils ont donc amorcé il y a quelques années une dynamique collaborative très intéressante, de montage de projets communs. C’est aujourd’hui, dans le cadre du plan de relance industriel par exemple, l’un des territoires qui fait émerger le plus de projets.

Par capital social, on entend la confiance entre les acteurs et leur capacité à travailler ensemble. C’est un déterminant très important dans la trajectoire économique des territoires.

On peut voir que ces mouvements collectifs sont très importants pour lancer des projets, pour attirer des financements. Cela tient beaucoup à l’existence d’un chef de projet, ce tiers de confiance en capacité de parler aux élus, aux services de l’État, aux industriels, qui sont des publics différents n’ayant pas toujours le même langage, les mêmes échelles temporelles, les mêmes priorités. Ce sont ce que l’on appelle des développeurs économiques, et notre programme a cherché à les financer et à les accompagner au sein des territoires qui pouvaient en avoir besoin, comme l’Axe Seine. Il compte trois ports qui ont souvent été en concurrence, et nous avons donc cherché à promouvoir ce principe de coopération entre eux, notamment autour de la création d’un campus des métiers de l’hydrogène. C’est un exemple de projet collectif que nous pouvons encourager.

 

Dans l’idée de capital social, il y a cette notion d’un capital immatériel, dans lequel on peut entendre la formation, la technique, la recherche, des orientations stratégiques… Cela fait-il partie de ce que vous cherchez à renforcer, au travers de cette coopération ?
J’entends ici par exemple, typiquement, la problématique des savoir-faire. Prenons l’exemple de l’horlogerie, dans laquelle on a des microtechniques uniques au monde. Vous avez encore en France certains territoires, comme les Vosges, où des savoir-faire comme ceux des métiers du verre, du textile, sont vraiment présents.

C’est une bonne illustration d’un capital immatériel que nous pouvons chercher à préserver au travers de projets liés aux compétences, que l’on accompagne et que l’on finance.

Au sein du volet des compétences, nous encourageons les écoles de production, qui sont à destination des jeunes en décrochage.

On peut également, par cette notion, évoquer l’identité, l’ADN industriel de nos territoires. Tous ne sont pas égaux dans leur capacité à accueillir des investissements industriels. Certains, comme la Bourgogne-Franche-Comté par exemple, ont une tradition et un attachement profond, qui peut s’exprimer malgré quarante ans de désindustrialisation, à l’industrie, à l’acte de conception, de fabrication, de production. Ce sont des terreaux favorables pour réindustrialiser le pays.

Que pensez-vous des nouvelles pistes, comme celle de l’ESS, vis-à-vis de cette problématique ?

 

Comment le programme de Territoires d’industrie peut aider ce genre de proposition ?
L’ESS est très importante : nous soutenons beaucoup de coopératives, de SCOP.

Au sein du volet des compétences, nous encourageons les écoles de production, qui sont à destination des jeunes en décrochage. Ce sont des écoles-usines qui portent la démarche du faire pour apprendre, et elles trouvent leur modèle économique dans les commandes des entreprises du territoire, qui les font travailler comme sous-traitants de production. La formation y est gratuite, pour des jeunes de quinze à dix-huit ans, qui en sortent avec en moyenne quatre à six promesses d’embauche. Un tiers de ces jeunes-là poursuivent leurs études vers un bac pro ou vers un BTS.

Nous sommes ici sur une illustration très positive de ce qui peut relever, pour moi, de l’économie sociale et solidaire. En 2018, nous comptions vingt-cinq écoles de ce type, et nous en sommes aujourd’hui à trente-cinq, et nous allons prochainement lancer l’initiative d’aller encore plus loin, car on voit que cela répond à la fois à la demande des industriels en compétences et à la nécessité d’accompagner les jeunes qui sont les plus exposés à la crise.

 

Quels liens entretenez-vous avec les pôles de compétitivité et les campus, ou avec d’autres systèmes d’accompagnement ?
Concernant les campus, il s’agit d’une démarche que souhaitons promouvoir et qui est porteuse de transversalité. Nous pouvons en voir un exemple dans la vallée de l’Huisne, qui est l’un des territoires les plus industriels du pays mais qui a beaucoup souffert de son émiettement administratif, car il se trouve à cheval sur trois régions : l’Eure et Loire, la Sarthe et l’Orne. Vis-à-vis des problématiques de formation, le fait d’avoir à faire à trois rectorats ou à trois conseils régionaux différents a fragmenté l’offre de formation. L’enjeu porté aujourd’hui par les industriels et les élus locaux est donc de structurer un campus des formations, et le programme Territoires d’industrie, par le biais notamment de la Banque des territoires, a accompagné en ingénierie l’émergence de ce projet de campus, au travers du financement du cabinet Hank, qui a démarré ses travaux il y a quelques mois pour appuyer la démarche.

Nous pouvons également parler des campus qui se développent autour de l’industrie du futur, et je pense notamment au campus porté par la Mecanic Vallée, sur le territoire Aurillac-Figeac-Rodez, ou à celui qui est porté par le territoire d’industrie de Sud-Alsace… Cette logique de campus inter-établissements, qui agit plutôt comme une mise en réseau et par la mutualisation d’ingénierie de formation, qu’au travers de lieux physiques, représente un élément que nous souhaitons fortement appuyer au sein du programme de Territoires d’industrie.

Concernant les campus, il s’agit d’une démarche que souhaitons promouvoir et qui est porteuse de transversalité.

Au sujet de l’implication des pôles de compétitivité, nous travaillons assez étroitement avec l’AFPC, l’association française des pôles de compétitivité, pour justement permettre que les pôles puissent apporter leur expertise aux territoires d’industrie. C’est évidemment variable d’un territoire à un autre, cela dépend des écosystèmes locaux, des relations interpersonnelles… Il y a une quantité de facteurs en jeu.

Pour prendre un exemple concret, les pôles de compétitivité peuvent être mobilisés pour le déploiement du VTE, le volontariat territorial en entreprise, en utilisant leur réseau pour chercher les moyens de faire venir de jeunes diplômés de grandes écoles dans les PME et ETI de nos territoires.

 

Pour revenir au campus et aux problématiques de formation, que dire de leur rôle dans la mise en lien et en termes de réflexion prospective ? Y aurait-il un intérêt national à fédérer ou à organiser un échange d’expérience entre campus ?
Cela se fait déjà, pas par nous mais par le ministère de l’éducation nationale, par le biais de Matthieu Merciecca, chef de la mission économie-éducation campus, qui organise cette animation de réseau des campus. Cela dépasse le sujet de notre programme, car certains campus ne sont bien-sûr par sur le champ des industries.

 

Pouvez-vous nous parler du projet Cœur de Territoire vis-à-vis de la problématique de la relance, son lien avec le programme Cœur de Ville ?
L’objectif de ce projet Cœur de Territoire est de rapprocher les formations des territoires, soit de manière physique par la création d’antennes, soit de manière digitale. Il s’agit d’une opération à l’initiative du CNAM et qui est inter-programme, à la fois Action Cœur de Ville et Territoires d’industrie, et fonctionne notamment grâce à l’implication de la Caisse des Dépôts, de la Banque des territoires, qui à la fois finance de l’ingénierie et de l’amorçage.

Ce projet Cœur de Territoire rapproche les formations des territoires, soit de manière physique par la création d’antennes, soit de manière digitale.

Nous n’en sommes qu’au début, mais cela fonctionne bien, nous avons été rejoints par de nombreux territoires.

Il y a probablement un enjeu à développer autour des campus connectés afin d’aller encore plus loin et d’embarquer d’autres organismes de formation. Cela peut faire partie des réflexions à venir.

 

Est-ce que l’accompagnement de projets de ce type nécessite un renfort de compétence, par exemple en GPEC, dans une approche plus globale que sectorisée ?
Je suis totalement d’accord avec cette idée. Globalement, tout ce qui relève de la formation professionnelle a été technicisé à l’extrême. Aujourd’hui, on peut percevoir, quelque part, une forme d’entre-soi entre les acteurs.

Une réflexion avec le monde académique, le monde industriel et les élus locaux sur la suite du programme.

Il y a un coût d’entrée énorme, parce que l’on est sur une approche de dispositifs qui s’empilent où l’on oublie le sens de l’intervention publique. La situation se schématise avec de nombreux acteurs et une multitude de dispositifs qui souvent se concurrencent ou doublonnent et sont extrêmement techniques. Il y a sans doute un enjeu d’inversion de l’appréhension de ce problème, et la nécessité de « muscler » les équipements locaux pour pouvoir accompagner ces projets.

 

Quelques mots de conclusion ?
Nous sommes en train de lancer une réflexion avec le monde académique, le monde industriel et les élus locaux sur la suite du programme, ce qui va aussi nous permettre de prendre en compte les problématiques liées à la pandémie, qui a profondément impacté les territoires, ainsi que celles de l’évolution rapide de l’industrie. Nous allons travailler, ces prochains mois sur la manière de faire évoluer le programme à la fois sur ces priorités stratégiques, ces axes que nous avons évoqué en début d’entretien, sur ses périmètres d’action, et sur le sujet de la gouvernance, qui est un facteur déterminant pour la réussite des transformations et des projets en cours.

 

Propos recueillis par Didier Raciné
Rédacteur en chef d’Alters Média

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